2055. Steevyshady, youtubeur hyper botoxé raconte le destin incandescent de son idole, la diva pop Mimi Madamour, du top de sa gloire en 2005 à sa descente aux enfers, précipitée par son histoire d’amour avec l’icône punk Billie Kohler. Pendant un demi-siècle, ces reines du drame ont chanté leur passion et leur rage sous le feu des projecteurs.
AVEC : Louiza Aura, Gio Ventura, Bilal Hassani, Nana Benamer, Alma Jodorovsky, Thomas Poitevin, Dustin Muchuvitz, Raya Martigny, Asia Argento, Mona Soyoc, Drag Couenne, Jean Biche, Julia Fiquet
Réalisation Alexis Langlois • Scénario Alexis Langlois, Carlotta Coco, Thomas Colineau • Image Marine Atlan • Son Marie Paulus • Montage Alexis Langlois, Gabriel Gonzalez • Musique Originale Pierre Desprats • Chansons Originales Rebeka Warrior, Yelle, Pierre Desprats, Mona Soyoc, Louise Bsx • Décoration Anna Le Mouël, Barnabé d’Hauteville • Mixage Thomas Gauder • Création Graphique Mathieu Delahausse • SFX Fred Lainé – Atelier 69 • Production Inès Daïen Dasi (Les Films du Poisson), Benoit Roland (Wrong Men)
Alexis Langlois
ALEXIS LANGLOIS commence par filmer ses copaines, ses démons et ses révoltes dans une série de courts métrages qui dessine petit à petit son univers glittercore politique, satirique et poétique. Après DE LA TERREUR, MES SŒURS !, Grand Prix du FIFIB 2019 et LES DÉMONS DE DOROTHY qui remporte le Léopard d’Argent, le Grand Prix du Jury Jeune à Locarno en 2021 et circule dans plus d’une centaine de festivals à travers le monde, iel réalise son premier long métrage. LES REINES DU DRAME fait sa première à la Semaine de la Critique de Cannes en 2024.
2024 : Les Reines du Drame
2021 : Les Démons de Dorothy (CM)
2019 : De la terreur, mes sœurs ! (CM)
2017 : Debout demain (CM)
2017 : À ton âge le chagrin c’est vite passé (CM)
2016 : Fanfreluches et idées noires (CM)
2014 : Je vous réserve tous mes baisers (CM)
2012 Mascarade (CM)
ENTRETIEN AVEC ALEXIS LANGLOIS
D’où vient le film ?
D’une rupture, d’une histoire très passionnée, empreinte de rivalité et d’admiration que j’ai vécue avec une personne qui a inspiré le personnage de Mimi. On venait de deux milieux différents, on faisait la même chose. Quand l’histoire s’est terminée, j’ai eu envie de la raconter, d’essayer de comprendre ce qui s’était passé. C’est là que le désir de mélodrame est arrivé. Le sentiment que cet amour était impossible me rappelait des récits, des films et des mélodrames que j’aime beaucoup.
Quels étaient ces récits ? On pense notamment à A Star is Born de George Cukor ou bien Eve de Mankiewicz
LES REINES DU DRAME est pétri de références. Il y en a certaines qui sont très actives, auxquelles nous avons immédiatement pensé à l’écriture avec Carlotta Coco et Thomas Colineau et puis d’autres comme effectivement EVE ou certains films d’Almodovar. A STAR IS BORN, le film de Cukor avec Judy Garland a vraiment été une référence. On a beaucoup regardé de cinéma américain des années 50-60. Je pense aussi à THE GIRL CAN’T HELP IT de Frank Tashlin mais aussi à beaucoup de films sur le milieu du spectacle, aux films de Brian De Palma. J’avais beaucoup d’envies de mise en scène c’est aussi pour ça qu’on a choisi cette forme ultra classique du rise and fall. On se disait que plus on allait utiliser des codes balisés, plus la folie et les envies de mise en scène apparaîtraient/pourraient se déployer. Nous avions en tête un désir de mêler des références de chaînes YouTube à Hitchcock, aux cartoons ou encore de convoquer aussi bien le conte classique que les relectures à la Disney.
J’ai lu que plus jeune tu t’amusais à reproduire des clips de rap avec ta soeur, Injuste Langlois, Actrice de tes films. Est-ce que ton premier rapport au cinéma et à la cinéphilie vient de là ?
Oui complètement, du pastiche. Je me souviens qu’on avait fait ça sur AIRBAG GENERATION de Lolo Ferrari, où elle avait des seins énormes. Je viens d’un milieu qui n’est pas du tout cinéphile. Je pense que mon rapport aux images a d’abord été lié à ce que je voyais à la télé. Les clips mais aussi les séries, notamment BUFFY CONTRE LES VAMPIRES qui a été hyper importante. C’est tellement une série geek qui ne faisait que citer du cinéma. Dès qu’un personnage ou l’auteur de la série parlait d’un film, j’allais le regarder. C’est par cette porte que j’ai découvert des choses qui ont vraiment constitué ma cinéphilie.
Dans me film, tu cites la célèbre vidéo de Britney Spears qui cristallise certains enjeux du film.
Je ne sais pas si ça vient du fait que je sois une prolotte mais il y a une fascination très premier degré pour les stars et ce qu’elles peuvent provoquer chez les gens. Un amour fou, puis parfois une envie de les voir s’écraser. Cet élan contradictoire qu’ont beaucoup de fans envers leurs idoles a été l’un des fils conducteurs de l’écriture. Le film parle de cette cruauté tout en prenant la forme d’un hommage pour regarder tendrement celles qui aujourd’hui sont rejetées. C’est ce qui est arrivé à Britney Spears. Elle a été considérée comme une ringarde, puis ces dernières années ont été animées par une vision du monde plus féministe et on a réévalué son parcours et ce qui lui était arrivé. Le film est aussi empreint de ça, de l’envie de célébrer toutes les personnes has-been et les ringardes. C’était aussi important de placer le film dans une autre époque pour réfléchir plus facilement au fait d’être au placard. Ce sont toujours des enjeux contemporains mais on peut mieux parler de nous avec cette distance.
Tu as eu toi même ce rapport de désamour avec les icônes de ton enfance ? Tu as conscientisé qu’une partie de la culture populaire n’était pas considéré comme « noble » par une certaine élite culturelle et tu as voulu t’en éloigner ?
Oui bien sûr et c’est aussi ce que raconte le film, comment correspondre à soi et à ce qu’on attend de nous. Ça fait quelques temps maintenant que je me suis réconciliée avec certaines références mais effectivement quand on débarque à Paris, qu’on n’a jamais vu un Truffaut et qu’à la fac on ne jure que par la Nouvelle Vague, on évite de crier sur tous les toits son amour pour Buffy et Britney Spears. Après je n’aimais pas que ça, j’avais aussi découvert au lycée Tod Browning qui avait été hyper important pour moi. Plus tard, il y a eu Werner Schroeter. Mais au début, je me disais que pour faire un film intéressant, certaines choses n’étaient pas acceptables. Ce qui m’a libérée c’est quand j’ai commencé à sortir, à laisser vivre mon identité queer et à rencontrer d’autres personnes queer. C’est comme, si j’avais une deuxième formation, une fac alternative dans les clubs où les personnes queer me transmettaient leur culture que je n’avais pas. À ce moment-là, j’ai découvert Gregg Araki, John Waters, Lizzie Borden… D’un coup ça reconsidère et reconfigure le rapport au cinéma. Il y a cette fameuse phrase de Schroeter où il dit qu’il adorait aller au Louvre et regarder la Joconde en écoutant Sylvie Vartan. J’aime bien cette idée de pouvoir regarder un film de Werner Schroeter puis un clip de Cardi B et de les aimer du même amour.
Tu as le sentiment que ce cercle vertueux entre le populaire et le pointu a encore du mal à passer en France ?
Oui j’ai l’impression qu’il faut souvent choisir dans le cinéma français, entre faire des films très populaires ou faire des films d’auteurs. LES REINES DU DRAME prône le contraire, un mélange de registres et de genres. Dans le cinéma que j’aime, il y a cet amour de l’hybridation. J’espère que dans le film il y a, à la fois, des choses très drôles et des choses déchirantes. Je crois que c’est ça qui est excitant. Une autre référence me vient c’est Minnelli. Je pense aussi à l’une de mes actrices préférées : Judy Holliday qui a pas mal inspiré le ton du film, c’est une marrante mélancolique. J’ai accepté que toutes ces références me constituent mais je n’invente rien, il y a plein de cinéastes qui le font aussi. C’est vrai qu’il y a un écart entre l’appréciation des gens, le bon accueil des films, et le moment de fabrication où l’on cherche des financements et où ce n’est pas toujours apprécié. En commission, l’imaginaire très pop des Reines ne plaisait pas du tout. On sentait que ce n’était pas le cinéma qu’ils estimaient intéressant.
Ce qui permet aussi d’évacuer cette appellation de « cinéma de niche », comme si ces récits ne pouvaient pas occuper le centre ?
Oui, en fait ce sont des histoires d’amour. S’il ne fallait être ému que par des personnages qui nous ressemblent, on regarderait très peu de films. Je crois que la puissance du cinéma c’est d’être touchés et intéressés par des récits qui ne nous correspondent pas forcément. Je déteste ce terme de niche même si parfois je suis très touchée par des cinéastes qui s’en revendiquent. Je voulais donner des grands récits à des personnes queer, du romanesque. J’ai l’impression que souvent les personnes queer sont mises en scène dans des récits qui s’apitoient, qui sont tristement réalistes alors que je suis convaincue que nous avons aussi envie de vivre ce qu’il y a de plus fort dans le cinéma, des grandes passions, des grandes pulsions. La dimension queer vient aussi du fait que les personnages, ou parfois les acteurices qui les interprètent, sont souvent dans une expression de genre Gender fuck. Au delà du genre : hyper fem, hyper butch, ou tout à la fois. Tous mes films sont obsédés par l’idée de se défaire des normes de genre. Et Les acteurices queer ont cette virtuosité en iels, iels peuvent tout jouer et c’est ça que j’aime mettre en scène.
On Comprend que Mimi et Billie ne vienent pas du même milieu sans que le film ne s’y attarde trop.
Au départ, c’était très marqué dans le scénario. On a tourné des choses façon « La belle et la clocharde ». Puis on a changé, en voulant préserver la dimension onirique du film. Mais j’ai l’impression qu’on le ressent quand même. Harmony [Alma Jodorowsky] appelle Billie «crasseuse» par exemple. À l’origine, le mot prolotte était cité plusieurs fois. C’est une chose sur laquelle j’ai longtemps hésité. Puis il y a eu une question de rythme qui est entrée en jeu. À un moment, ça m’a vraiment manqué mais j’ai eu l’impression que même si on employait un autre vocabulaire, on comprenait qu’il s’agissait de deux mondes opposés. Parfois, c’est le film qui appelle sa propre écriture et puis c’était une donnée déjà clairement énoncée dans LES DÉMONS DE DOROTHY. La dédicace à la fin nomme d’ailleurs les prolottes donc ce n’est pas quelque chose que j’ai voulu gommer.
Le film se compose de quelques lieux qui occupent une place centrale et symbolique. Ils te sont apparus tout de suite à l’écriture ?
Oui mais il y avait aussi une problématique très concrète liée au manque d’argent. On réfléchissait un peu comme dans une série télé. On savait qu’il y aurait un le club, un lieu qui représente Billie, un autre Mimi. Il y avait à la fois une économie de décors mais aussi cette question : qu’est-ce qu’il se passe quand un personnage va dans endroit où il ne devrait pas être ? C’est cette scène où Mimi et Harmony débarquent dans le club par exemple, ou celle où Billie se trouve pour la première fois chez Mimi. C’est avec Anna Le Mouël et Barnabé d’Hauteville qui ont fait la déco du film qu’on a vraiment réfléchi concrètement à l’agencement de ces lieux. La symbolique était là très tôt.
L’émotion suscitée par le film vient aussi de la manière dont lefilm vient aussi de la manière dont le film fait ressentir le passage du temps. Comment as-tu vécu le passage du court au long métrage, en sachant que tu étais déjà identifié. Ass-tu été confronté à une défiance par rapport au changement de format ?
J’ai reçu des avertissements oui. Déjà après DE LA TERREUR MES SOEURS, avant LES DÉMONS DE DOROTHY, plusieurs personnes m’ont dit : maintenant il faut écrire un long. À l’époque j’avais des vagues idées, j’avais le début de l’histoire des REINES DU DRAME. Je savais que l’histoire nécessitait ce format mais je ne voulais pas faire un long pour faire un long, ça me terrorisait, je n’avais pas envie de le faire tout de suite. À l’époque, je n’avais pas rencontré Inès [Daïen Dasi, sa productrice aux Films du Poisson ], c’est aussi elle qui a été déterminante. Cette histoire avait besoin d’ampleur, de temps. C’est surtout à l’écriture que les gens mettaient un peu les warnings. Les financeurs disaient : « on adore tes courts mais sur une heure et demi, on va faire une overdose ». Mais les avertissements étaient plutôt bienveillants. Le mélange des genres était hyper important mais surtout le mélodrame que je n’avais jamais exploré même si dans les courts, le moteur mélancolique était déjà présent. On n’écrit pas tout à fait la même chose quand on sait qu’on a envie que les specateurices soient émues. On avait tout le temps ça en tête avec les co-auteurices et avec Inès. Ce qui est au coeur du film, c’est cette histoire d’amour et cette émotion. On a beaucoup beaucoup répété avec Gio et Louiza pour qu’il y ait une alchimie, une émotion sensible. Leur force à l’écran a souvent fait revoir le jugement des personnes qui ne croyaient pas à leur passion à la lecture du scénario. Je pense aussi qu’il y a surement une queerphobie intériorisée. Comme si le fait qu’on soit dans un univers camp, flamboyant empêchait l’émotion.
Peux-tu me parler de ta collaboration avec la cheffe opératrice Marine Atlan ? J’ai l’impression que le film est travaillé par cette idéee du diamant, du cristal qui apparait dans le générique et par ses effets de réverbérations. C’est comme si ce motif racontait aussi la manière dont tu redonnes vie à certaines images et dont tu t’en nourri.
Cela fait un moment que l’on travaille ensemble. On a fait LES DÉMONS DOROTHY et LES REINES DU DRAME mais aussi des clips et des bandes annonce de festival ensemble. On a pu explorer des choses qu’on ne s’autorise pas d’habitude. On n’a pas exactement la même cinéphilie mais on a beaucoup de goûts en commun, on est de la même génération. Ce qui a amusé Marine c’était de pouvoir passer de Sometimes de Britney Spears à PHANTOM OF THE PARADISE avec une approche très premier degré. En analysant certains télé-crochets, certains clips, on s’est rendu compte qu’il y avait beaucoup de codes, comme le fondu enchaîné, similaires dans le cinéma classique et une émission comme LA NOUVELLE STAR. Convoquer les références, les relier par le fondu enchaîné, c’est quelque chose qui nous a beaucoup amusé. Notre règle, notamment pour la première partie du film, c’était de faire un Technicolor des années 2000, de mélanger des images de clips de Christina Aguilera à un celles d’un Minnelli, au bleu d’un BLUE VELVET [de David Lynch]. Le film traverse plusieurs époques, donc il fallait essayer de faire se rencontrer à l’intérieur du film ces images différentes mais aussi ces différents types de cinéma. Par exemple, quand on arrive au Trois Moon, les références étaient plus Cassavetiennes, je pense notamment à un film comme MEURTRE D’UN BOOKMAKER CHINOIS. Le film a aussi quelque chose de très seventies et c’est marrant parce que ça n’a jamais été conscientisé comme ça. On a beaucoup travaillé en amont parce qu’on a tourné très peu, vingt-cinq jours.
Ton goût pour la comédie musicale a toujours été présent dans tes films.
J’ai souvent travaillé avec des personnes qui faisaient la musique, soit qui écrivaient. Dans À TON ÂGE LE CHAGRIN C’EST VITE PASSÉ, il y a certaines acteurices du film avec lesquelles j’avais écrit les paroles. J’ai souvent travaillé en groupe. Là, j’ai plus écrit que les autres fois mais Carlotta Coco et Yelle ont aussi écrit les chansons, notamment celles de Mimi Madamour ou de Magalie Charmer. J’adore faire ça. C’est un exercice qui n’était donc pas nouveau mais qui a pris une autre ampleur. C’est une manière d’aller au cœur des émotions des personnages, c’est l’expression à cœur ouvert. On peut rarement dire ce que les personnages chantent dans la vraie vie. C’est une façon d’exprimer ses émotions de manière ultra poétique. Il n’y a pas de médiation entre le sentiment et ce que l’on entend et voit à l’image. Dans la comédie musicale, on peut être ultra formaliste et en même temps extrêmement proche des personnages. L’artifice il n’y a que ça comme vérité. Dans le film, quand un personnage a un chagrin d’amour, le monde s’écroule littéralement sous ses pieds.
Le film reconduit une idée romantique de l’amour comme passion dévorante. Il est en même temps très connecté à des préocupation contemporaines sur le consentement, la sororité sans jamais soumettre les personnages à la règle d’une exemplarité.
Je crois que le film montre des personnes qui s’aiment mal parce que le monde tel qu’il est, structuré par le patriarcat les empêche de s’aimer vraiment. C’est important d’avoir des représentations différentes mais par contre je crois que c’est aussi absurde de gommer nos travers et nos défauts. Billie et Mimi ne font pas des choses très belles tout le temps et ça me paraissait important aussi de montrer ça. Quand on est amoureux·ses, c’est bien d’essayer de se déconstruire mais parfois il y a des choses qui ratent. Ce n’est parce qu’on fait des erreurs qu’on ne peut pas changer. Je crois que c’est très important de voir des personnages qui malheureusement aiment mal mais qui vont apprendre à aimer. L’idée que tout le monde a droit à une seconde chance, c’est pour moi une pensée queer. Il y a un peu ce truc que disait Renoir : tout le monde a ses raisons. Le film est féministe et queer parce qu’il montre des choses sombres sans les célébrer.
Faire du cinéma queer engage j’imagine une réinvention de la manière dont s’organise un plateau de cinéma.
J’essaye de travailler avec une équipe pour qui le film compte car il est indispensable pour faire un cinéma queer qu’il y ait un élan et une envie commune des gens devant et derrière la caméra. Je suis très attachée à la notion de troupe et je retrouve la plupart de mes collaborateurices de film en film. Carlotta Coco avec qui j’écris m’accompagne depuis le lycée, Matthieu Delahausse a fait toutes les animations et le graphisme de mes films depuis douze ans, … Il me semble très important d’être hyper ouverte, à l’écoute de chacun.e pour que la création soit un moment collectif et joyeux. Les personnages de Gio et Louiza ont par exemple beaucoup évolué à leur contact car je trouvais important que les rôles épousent leurs particularités et célèbrent leurs identités choisies. La hiérarchie c’est quelque chose de compliqué puisqu’il y a toujours quelqu’un qui pense le film mais je crois qu’il faut rester aussi ouverte à ce qu’il évolue avec l’investissement de chacun et chacune.
ENTRETIEN AVEC BILAL HASSANI
De Quelle manière s’est faite la rencontre avec Alexis Langlois ?
Alexis est venue vers moi alors que j’étais fan depuis des années. Je suivais son travail depuis DE LA TERREUR MES SŒURS, que j’avais découvert et regardé en boucle pendant une semaine. Fin 2021, Alexis m’a appelé et m’a demandé de venir la rencontrer aux Films du Poisson. J’y suis allé sans attente particulière, sans savoir ce qu’iel allait me présenter. C’est à ce moment-là qu’on a parlé de Steevy pour la première fois et qu’iel m’a proposé le rôle. Iel m’a ensuite gentiment laissé lire le scénario à tête reposée. Je me rappelle d’être face à Alexis, d’entendre le synopsis du film et de me dire tout de suite : je vais dire oui, c’est génial.
Ce jour-là, de quelle manière Alexis t’a présenté le personnage ?
Ce qui m’avait frappé, c’était la douceur avec laquelle iel parlait de Steevy, ce que je trouvais assez surprenant parce c’est un personnage spécial, qui n’est pas la personne la plus sympathique de la terre. Alexis avait beaucoup d’empathie pour lui, c’était très important que Steevy possède plusieurs dimensions et de comprendre pourquoi il était comme ça.
Tout l’enjeu du rôle s’est trouvé ici ? Construire un personnage à la fois inquiétant tout en ayant un oeil bienveillant et tendre à son égard ?
Oui ça a été le sujet de nos discussions, puis dans un second temps l’enjeu des répétitions. Ce qui était assez marrant, c’est que très vite Alexis m’a demandé de ne pas spécialement préparer le rôle alors que j’avais tout de suite en tête l’idée de prendre des coachs. Je n’avais pas joué depuis mes dix ans au conservatoire de théâtre. J’avais peur de ne pas savoir faire du tout. Alexis voulait qu’on prépare, qu’on répète et qu’on trouve Steevy ensemble. C’est ce qu’on a fait pendant plusieurs mois. J’étais d’abord seul avec Alexis, puis ensuite avec Louiza [Aura] pour simuler les nombreuses rencontres avec Mimi.
Ton personnage est le narrateur de l’histoire. Est-ce qu’en préparant ton rôle tu devais toi aussi avoir une parfaite connaisssance de l’histoire d’amour en cours, pour mieux te glisser dans la peau de Steevy ?
La priorité pour Steevy était de décortiquer ses ressentis par rapport à Mimi. Il est surtout obsédé par Mimi. Son regard sur la relation que Mimi et Billie entretiennent n’est pas celui du spectateur·trice. J’ai beaucoup analysé le scénario pour bien être sûr de connaître tous les petits détails mais j’essayais surtout de garder un avis très biaisé sur la relation, d’avoir une vision envenimée par le fanatisme. Entre Steevy le narrateur, et Steevy le personnage, il y a quand même deux mondes.
C’est Comme ça que tu as abordé le rôle, en travaillant deux personnages à l’intérieur d’un seul ?
Assez oui. Il y avait le Steevy narrateur sur lequel on a vraiment travaillé une partition de conteur avec beaucoup de visionnages riches en jolies références, dont certaines très populaires et amusantes comme le Disney ALADIN. Sur le Steevy qui est dans la narration, c’était un tout autre travail. J’entretenais un rapport très différent avec ces deux personnages. Pendant un temps, on s’est nourris de vidéos de fans qui réagissent à la sortie d’un nouveau clip. Le rôle de Steevy m’a permis aussi d’aller puiser dans des choses personnelles puisque quand j’étais petit, j’étais fan de beaucoup de chanteuses. Je suis donc allé rechercher un peu tout ça. J’avais beaucoup de pièces à conviction ! Quand on regarde un fan de l’extérieur, cela peut paraître un peu risible, on peut se dire que ce n’est pas possible de se mettre dans un état pareil pour un artiste qu’on aime. Mais pour moi, cette donnée a été très importante dans mon développement personnel, pendant l’enfance et l’adolescence. Les pop stars ont été un refuge. Je pense que ça m’a aidé à donner une vraie sincérité à l’amour que voue Steeve à Mimi.
Comment as-tu abordé le fait que ton personnage traverse des décénnies ? Qu’est-ce qu’on invente pour jouer le temps qui passe ?
J’appréhendais beaucoup cette partie du challenge, mais ça a aussi été pris en compte dans le temps de préparation. Ça s’est surtout joué dans la voix de Steevy. L’enfant Steevy qui découvre Mimi, a beaucoup d’innocence dans la voix. La vraie peste arrive quand il a vingt-cinq ans. Ce que j’ai essayé de maintenir jusqu’à ses soixante ans, c’était l’idée selon laquelle Steevy se serait développé, mais pas complètement. Il garde toujours les mimiques de l’enfant qu’il était en mettant un peu de gloss et d’huile pour la rouille dessus ! Même vieux, il essaye d’être toujours très dynamique, il a toujours cet enfant en lui, il est resté fan. Dans son rapport à sa corporalité, j’ai toujours essayé de garder ça. Steevy pense qu’il a encore 15 ans.
Dans Les Reines du Drame, l’artifice est au service des émotions. Joueur avec des prothèses, qu’est-ce que ça change ? Êtres plus dissimulé permet d’être plus vrai ?
Ce que j’ai trouvé très amusant, c’est que ce n’était pas du tout restrictif. Le travail en make-up était impressionnant. C’était très fin sur la peau à tel point qu’au bout d’une journée passée avec, je ne sentais plus la prothèse sur le visage. Il y avait quelque chose de presque rassurant pour mon jeu. J’ai l’impression que je pouvais aller plus loin dans des expressions cartoonesques. Ça me permettait de charger un peu plus mon jeu, de trouver des choses que je n’aurais pas trouver sans ce visage-là. Je pouvais en faire plus puisque je n’avais pas l’impression que c’était moi. Il y a moins d’embarras quand on ne se reconnait pas dans le miroir je crois. On a pas mal parlé de ce que fait Jim Carrey dans THE MASK par exemple et de la manière dont il articule son corps, ses mots. Il y a eu beaucoup de recherches sur le plateau. J’essayais toujours de faire des propositions différentes à chaque prise. J’avais ce petit besoin interne d’entendre rire un peu l’équipe. Avec mon corps, ma voix, j’essayais toujours de pousser les curseurs.
Quel rapport avais-tu au cinéma avant Les Reines du Drame ? Tu as fait du théatre avant la musique ?
Oui j’ai toujours beaucoup aimé le théâtre et le cinéma. J’ai passé quelques années au conservatoire et après j’ai mis ça de côté parce que je voulais prioriser la musique et le chant sans m’interdire le fait de rejouer peut-être un jour. Dans ma musique, dans mes clips, il y toujours une part de jeu. L’idée de me retrouver sur un plateau, de tourner avec des acteurices, était quelque chose qui me donnait envie. Je suis très content d’avoir eu mon baptême sur ce film-là.
Qu’est-ce qui te touche particulièrement dans le cinéma d’Alexis Langlois ?
J’aime beaucoup les films mais je ne me qualifierais pas de cinéphile, donc peut-être que ce que je vais dire est complètement faux mais quand je découvre le cinéma d’Alexis, j’ai l’impression qu’il n’existe pas, en tout cas en France, et de ne jamais avoir vécu une expérience aussi forte. Tous mes sens étaient éveillés, je pleurais et riais en même temps, de manière hystérique. Il y a tout ce que j’aime, tout ce qui me touche, tout en restant hyper universel. J’aimerais bien que les films soient un peu plus comme ça ! Je pense que l’histoire de Mimi et Billie est trop importante et encore trop rare. On veut encore de ces récits-là, on en veut des milliers. C’est un film qui est important politiquement dans le paysage actuel, on a besoin de voir ces histoires parce qu’on est visibles mais pas assez. Il faut qu’on le soit plus.
ENTRETIEN AVEC GIO VENTURA & LOUIZA AURA
Avant de passer le Casting pour Les Reines du Drame, étiez-vous familier·ières du cinéma d’Alexis Langlois ?
GIO VENTURA : Je connaissais le cinéma d’Alexis depuis quelques années. Je lui avais écrit un message après avoir vu ses films, message qui est passé complètement à la trappe. Iel m’avait répondu un truc très bref, comme un merci à son fan (rires). En 2021, j’étais à Locarno pour le film de Yann Gonzalez, FOU DE BASSAN. J’ai croisé Alexis à la fête du festival. Je suis revenu à la charge en lui disant que c’était moi qui lui avais écrit. J’ai fini par atterrir au casting et iel m’a dit «je t’ai déjà vu quelque part.» ! ll n’y a pas beaucoup de réalisateurs et de réalisatrices en France qui font de vraies propositions visuelles comme celles d’Alexis. Ce qui me plait beaucoup dans son cinéma, c’est que j’ai l’impression que la question du genre est presque dépassée, on touche à du monstrueux, tout se joue avec les prothèses etc. C’est encore un cran après.
LOUIZA AURA : Je ne connaissais pas du tout son cinéma avant. Mon agent m’a envoyé sur le casting pour le rôle de Mimi. Il m’avait aussi transféré le lien de son court métrage DÉMONS DE DOROTHY [2021]. J’avais regardé le film avant le casting et j’ai vraiment adoré. Je trouvais ça génial, ce que ça racontait, l’esthétique… J’ai commencé les castings pour Mimi. Il y en a eu 5 pour le rôle et ça s’est toujours hyper bien passé avec Alicia Cadot qui est une directrice de casting très douée.
À quel moment du casting vous êtes-vous rencontrés ?
L : J’ai fait un premier casting toute seule. À partir du deuxième, il y avait des Billie. J’ai rencontré trois, quatre acteurices puis j’ai fait le dernier casting avec Gio. Il a eu l’idée géniale qu’on se rencontre la veille. Donc la veille au soir on est allés boire des verres. On a parlé du film, un peu de notre vie aussi pour faire connaissance. Le lendemain, quand on est allés au casting, on était vraiment en équipe, c’était nous deux ensemble, ou personne !
G : C’était bien de ne pas être compétition, de se présenter en binôme et de défendre ce binôme. En plus pour le casting, on devait jouer la scène de rupture. On s’est dit qu’avant de se quitter, il fallait se rencontrer. Ça a été très important qu’on se mette d’accord avant et qu’on se présente ensemble.
Vous sentiez déjà au casting que les rôles seraient malléables en fonction de vous.
L : Oui, les deux personnages ont beaucoup évolué en fonction de notre personnalité. Pendant les répétitions, j’ai eu l’impression qu’on partait un peu d’une base de qui j’étais. J’ai ce truc à la fois un peu gamine mais aussi, parfois, un peu grave, comme Mimi. Le personnage a beaucoup évolué quand on a fait les répétitions à Bruxelles. Les semaines ont été intensives avant le début du tournage. Je pense que c’est en répétant autant qu’on a pu voir aussi comment nos personnages pouvaient être augmentés, pouvaient être encore plus profonds, encore plus complexes. Pour ma part, ça s’est joué plutôt sur l’identité afro descendante de Mimi, sur le fait qu’elle subisse une forme de blanchissement au cours de sa progression. Il fallait appuyer cette dimension du personnage.
G : Je suis d’accord, je pense qu’Alexis est très ouverte. Peu de dialogues ont changé mais il y a eu, par exemple, des discussions autour des chansons comme Go Musclées. Comme je fais beaucoup de muscu, c’est un endroit où on s’est rencontrés pour inventer un truc un peu fun du personnage pour qu’elle puisse se marrer sur scène.
De quelle Manière Alexis vous a présenté les personnages avant que vous vous les appropriiez ?
L : Je n’ai pas l’impression qu’iel a décrit vraiment Mimi. Dès le départ, c’était le couple qui était au centre, la dimension à fleur de peau des personnages, la sur-émotion. On naviguait plus sur cette intensité dès le début dans les castings que sur le personnage.
G : Iel nous a beaucoup parlé du côté miroir. Dans le film, il y a des moments où l’on a envie d’adorer puis de détester l’une, puis l’autre. Tous les défauts que l’une peut avoir peuvent s’inverser sur l’autre, à un autre endroit. Il y avait cette construction en miroir qui était très importante et qui permettait aussi de traverser les époques.
Qu’est-ce que ça change pour vous en tant que jeune acteur et aactrice de joueur un rôle sur plusieurs décennies ?
L : C’était ambigu, c’est à la fois dur et facile. Je voyais des aspects de ma personnalité dans les deux Mimi, la Mimi hyper jeune et celle de 2015. Le travail consistait à amplifier deux aspects qui sont contrastés. Alexis nous avait donné des références pour les deux époques de nos personnages. On savait vers quoi on se dirigeait, vers quel genre de jeunesse il fallait aller, pareil pour la maturité. C’était hyper enrichissant.
G : Le film est exigeant à plein d’égards. Il y a cette dimension temporelle mais il y a aussi le fait que ni Louiza, ni moi, n’avions de base de chant ou de danse. Il y a toute une construction autour des personnages, il y a ce jeu avec les prothèses. Ce sont des rôles complexes et c’est vrai que maintenant tout paraît un peu fade par rapport à ce qu’on a pu vivre.
Quelles étaient les références données par Alexis ?
G : Je pense qu’Alexis et moi on a beaucoup de références en commun grâce notamment à des livres de théorie queer. On a des antécédents politiques assez proches. Au niveau de la musique, il y a plein de choses qu’iel me montrait et que je connaissais : Deli Girls, Courtney Love, Béatrice Dalle aussi un peu, Sexy Sushi… Beaucoup de personnages de filles assez punks et assez libres et de mecs aussi d’ailleurs. Iel nous a montré ROMÉO + JULIETTE [ de Baz Luhrmann ] en nous disant que la scène où DiCaprio tombe à genoux et pleure c’était le niveau minimum d’intensité qu’il voulait dans son film.
L : C’était les idoles de la pop des années 2000, Britney Spears, Priscilla, Mariah Carey beaucoup parce que j’étais plus proche d’elle que des autres. On avait cette Dropbox où iel mettait des liens des films qu’on devait regarder, un peu comme des devoirs. On avait énormément de matière pour s’inspirer et pour construire nos personnages. SAILOR ET LULA aussi a été important, on a même joué une scène du film pour travailler notre complicité. David Lynch était l’une des références. Alexis m’avait demandé de regarder MULHOLLAND DRIVE pour comprendre la trajectoire des deux personnages.
Il était déjà spécifié au casting qu’il s’agirait d’un film musical ?
G : Je l’ai su assez vite. À l’origine, c’était Rebeka Warrior [l’une des compositrices de la musique du film] qui devait chanter mes chansons. Finalement, j’ai dit à Alexis que ça faisait des années que je chantais sous ma douche et au karaoké et que ça me dirait bien d’essayer. Il y a eu un moment où la question était de savoir si j’allais être capable de le faire suffisamment bien. J’étais très content de pouvoir bosser le chant, qu’iel m’ait fait confiance, et aussi d’avoir pu collaborer avec Rebeka, Pierre [ Desprats, l’un des compositeurs de la musique du film ]. Ça agrandissait le personnage.
L : Je m’en doutais, mais je n’avais pas réalisé l’ampleur de la dimension comédie musicale avant d’avoir lu le scénario. À la lecture, j’ai trouvé ça très excitant. Je ne sais ni chanter, ni danser. L’idée d’apprendre me plaisait. Non seulement il y avait le jeu autour du personnage mais j’allais aussi pouvoir développer des skills inattendus. Bon, je ne sais toujours pas chanter donc je fais du playback !
Quels enjeux particuliers ça a pour vous le fait que le film commence au début des années 2000 ?
L : Ça servait l’histoire de le faire dans cet ordre-là, en terme de dramaturgie ça permettait d’avoir un switch radical entre les deux époques, quelque chose de déchirant.
G : Je pense qu’il y a aussi un jeu avec les années 2000 qui depuis quelques années reviennent esthétiquement. Ça pose aussi des questions notamment par rapport à ce retour de modèle de filles comme la chanteuse Alizée par exemple, des modèles très « Lolita ». Qu’est-ce que cette féminité-là raconte ? Qu’est-ce qu’elle veut dire aujourd’hui quand elle revient avec tout le chemin qui a été fait ? Je pense aussi que ça permettait d’avoir de la distance. Dans les années 2000, faire un coming out public, être une chanteuse pop out, ce n’était pas la même chose.
À la période de l’adolescence, y a-t-il des films importants pour vous, qui semblez offrir une vision du monde plus queer ?
G : Je pense que dans mon adolescence, il y a surtout eu un manque de ces représentations-là. Un film que j’adore c’est DIAMANTINO de Gabriel Abrantes et Daniel Schmidt qui est queer d’une manière un peu étrange. Un autre film qui m’a beaucoup marqué c’est SHAKEDOWN de Leilah Weinraub sur un Strip-club lesbien à Los Angeles. Je crois que c’est l’une des premières fois où j’ai compris la justesse de gaze. Cette femme filme ces stripeurs qui sont sa famille, ses amis·ies. Plus tard, elle décide d’en faire un film comme si c’était des archives de famille. Il y a un truc d’égalité de regard qui m’a vraiment marqué dans ce film. J’espère que LES REINES DU DRAME va permettre de donner envie à d’autres personnes qui sont moins représentées de faire des films, j’espère que ça va ouvrir une porte.
L : Rien ne me vient, en tout cas pas pendant mon adolescence. Je me souviens que dans les références de films qu’Alexis nous avait données, il y avait But I’m a Cheeleader [ de Jamie Babbit, 1999 ]. Ce film m’a matrixée, l’histoire d’amour est tellement belle. L’intrigue prend place dans un monde hyper onirique et absurde. Je le trouvais très adapté pour LES REINES DU DRAME, c’est vraiment ça : deux filles qui s’aiment de manière intense et universelle mais qui sont plongées dans un monde bordélique et absurde. J’ai pris le rôle de Mimi très à cœur parce quand j’étais petite, je n’avais pas vraiment dans le cinéma de modèles de femmes racisées qui soient mises sur un piédestal, qui soient au cœur de l’attention.
Quels sont vos projets ?
G : Je réalise des films aussi à côté. Je suis en train de lancer un film qui s’appelle BOMEC, une histoire de strip-teaseur à la dérive. Je cherche des financements.
L : Je continue à passer des castings au cinéma mais comme disait Gio après LES REINES DU DRAME tout paraît un peu fade et insipide. De mon côté, j’écris beaucoup. Je suis en train de faire un recueil de poèmes, je bosse dessus, je vais voir si je peux le publier.