Les montagnes enneigées du Japon.
Comme chaque nuit, un poissonnier part travailler au marché en ville.
Takara, son fils de six ans, n’arrive pas à se rendormir. Dans la maison silencieuse, le petit garçon dessine un poisson sur une feuille qu’il glisse dans son cartable.
Le matin, sa silhouette ensommeillée s’écarte du chemin de l’école et zigzague dans la neige, vers la ville, pour donner le dessin à son père.
Avec : TAKARA KOGAWA (Le petit garçon) • KEIKI KOGAWA (La soeur) • TAKASHI KOGAWA (Le père) • CHISATO KOGAWA (La mère)
Réalisateurs DAMIEN MANIVEL & KOHEI IGARASHI • Producteurs DAMIEN MANIVEL, MARTIN BERTIER & MAKOTO OKI • Scénario DAMIEN MANIVEL & KOHEI IGARASHI • Image WATARU TAKAHASHI • Montage WILLIAM LABOURY • Son JÉRÔME PETIT, GEN TAKAHASHI • Mixage SIMON APOSTOLOU • Musique JÉRÔME PETIT• Assistants réalisateurs MASAYUKI UEDA & ATSUSHI HIRAI • Producteurs associés THOMAS ORDONNEAU, YOV MOOR • Avec la participation de LA RÉGION ILE-DE-FRANCE




Damien Manivel et Kihei Igarashi
FILMOGRAPHIES DES RÉALISATEURS
DAMIEN MANIVEL
2017 TAKARA, LA NUIT OÙ J’AI NAGÉ
2016 LE PARC
2014 UN JEUNE POÈTE
2012 UN DIMANCHE MATIN
2010 LA DAME AU CHIEN
2008 SOIS SAGE Ô MA DOULEUR
2007 VIRIL
KOHEI IGARASHI
2017 TAKARA, LA NUIT OÙ J’AI NAGÉ
2014 HOLD YOUR BREATH LIKE A LOVER
2013 HOUSE OF TOFU
2012 MARCHEN
2011 APARTNESS
2008 VOICE OF RAIN THAT COMES AT NIGHT
Nous nous sommes rencontrés au Festival de Locarno où nous présentions nos premiers longs-métrages respectifs, nous avons tout de suite parlé de cinéma et sommes devenus amis malgré la barrière de la langue.
Quelques mois plus tard, nous avons décidé de faire un film ensemble au Japon. Damien voulait filmer la neige, et, Kohei, travailler avec un enfant.
Nous sommes donc partis en repérage dans la région la plus enneigée du Japon, à Aomori, et y avons fait la rencontre d’un garçon de six ans, Takara.
Ce qui nous a bouleversé chez lui, c’est son mélange de fantaisie et de tristesse, sa sincérité à toute épreuve…
Dans la vie, son père est poissonnier et le petit garçon l’entend se lever chaque nuit pour partir au marché.
Quand il rentre de l’école, son père dort. Ils se voient donc très peu.
Nous avons tâché de raconter ce sentiment complexe d’amour et de distance, dans les pas de Takara.
Damien Manivel et Kohei Igarashi
5 QUESTIONS AUX RÉALISATEURS
C’EST LA PREMIÈRE FOIS QUE VOUS FAITES UNE CO-RÉALISATION,EN QUOI EST-CE DIFFÉRENT DE VOS PRÉCÉDENTS FILMS ? COMMENT AVEZ-VOUS TROUVÉ UN LANGAGE COMMUN ENTRE LE JAPONAIS ET LE FRANÇAIS ?
DM : On a écrit l’histoire et fait tous les choix ensemble mais sur le plateau on se répartissait naturellement les rôles. La plupart du temps, Kohei expliquait les actions aux acteurs et moi je dirigeais l’équipe technique, la caméra. Mais nous pouvions tout aussi bien inverser les rôles si la scène le nécessitait. Nous n’avons pas fixé de règle au préalable.
KI : Ce n’était pas très différent de mes films précédents, c’était très naturel de travailler avec Damien. On parlait en japonais, avec des mots simples. C’est peut-être la raison pour laquelle TAKARA raconte une histoire si simple.
C’EST EFFECTIVEMENT UNE HISTOIRE TRÈS SIMPLE, UN FILM MUET ET POURTANT TRÈS PROFOND ET UNIVERSEL…
DM :
Nous avons essayé de trouver la meilleure façon d’exprimer les
sensations et sentiments de notre enfance. Kohei est né au Japon, je
suis né en France et pourtant nous avons trouvé beaucoup de similitudes
dans nos souvenirs.
KI : Nous avons rencontré Takara
et passé beaucoup de temps à jouer avec lui pour comprendre la vie
qu’il mène et son monde. À travers lui, nous avons redécouvert notre
enfance.
EN PARLANT DE TAKARA, VOTRE ACTEUR DE 6 ANS… COMMENT L’AVEZ-VOUS RENCONTRÉ ET COMMENT A-T-IL TRAVAILLÉ SON RÔLE ?
KI : Nous
l’avons croisé un après-midi par hasard après un concert qui grouillait
d’enfants. Il courait partout, nous l’avons remarquétout de suite. Nous
sommes allés parler à sa mèreet très vite, on a su que c’était lui.
DM :
Mais c’est vrai qu’au départ, même si nous avions enviede le filmer,
nous ne savions pas comment nous y prendre, car les premiers jours il
était vraiment incontrôlable. C’est là où nous avons décidé de nous
adapter à sa vie et notamment de faire jouer toute sa famille dans le
film.
DANS TAKARA, TOUT EST INSPIRÉ PAR LA VIE QUOTIDIENNE, TOUT SEMBLE SI
NATUREL ET POURTANT IL Y A QUELQUE CHOSE EN PLUS, UNE POÉSIE QUI ÉMANE
DE CE RÉCIT. LES SONS ONT UNE GRANDE IMPORTANCE POUR VOUS ?
KI : La
première fois où je suis allé à Aomori, j’ai senti que ce lieu avait
quelque chose de sacré. Nous avions cela à l’esprit quand nous filmions
les paysages enneigés…
DM :
Étant donné qu’il n’y a pas de dialogues dans le film, nous avons mis
l’accent sur l’environnement sonore, l’impression d’espace, les pas dans
la neige, l’atmosphère si particulière d’Aomori.
ET PUIS IL Y A BEAUCOUP D’HUMOUR, UNE GRANDE MÉLANCOLIE. C’ÉTAIT PRÉSENT DÈS L’ÉTAPE DU SCÉNARIO ?
DM : Il faut savoir que Takara est très créatif mais têtu. Il n’hésitait pas à faire ses propres propositions, souvent décalées et drôles. Quant à la mélancolie… Nous le filmons quand il est vraiment triste, quand il dort vraiment, c’est un portrait sans filtre.
KI : Takara nous a tout de suite fait penser à un petit Chaplin japonais
C’est la première fois que vous
faites une co-réalisation, en quoi est-ce différent de vos précédents
films ? Comment avez-vous trouvé un langage commun entre le japonais et le
français ?
DM : On a écrit l’histoire et fait tous les choix ensemble mais sur le plateau on se répartissait naturellement les rôles. La plupart du temps, Kohei expliquait les
actions aux acteurs et moi je dirigeais l’équipe technique, la caméra. Mais nous pouvions tout aussi bien inverser les rôles si la scène le nécessitait. Nous n’avons pas fixé de règle au préalable.
KI : Ce n’était pas très différent de mes films précédents, c’était très naturel de travailler avec Damien. On parlait en japonais, avec des mots simples. C’est peut-être la
raison pour laquelle Takara raconte une histoire si simple.
C’est effectivement une histoire très
simple, un film muet et pourtant très profond et universel…
DM : Nous avons essayé de trouver la meilleure façon d’exprimer les sensations et sentiments de notre
enfance. Kohei est né au japon, je suis né en France et pourtant nous avons trouvé beaucoup de similitudes dans nos souvenirs.
KI : Nous avons rencontré Takara et passé beaucoup de temps à jouer avec lui pour comprendre la vie qu’il mène et son monde. A travers lui, nous avons redécouvert notre enfance.
En parlant de Takara, votre acteur de 6
ans… Comment l’avez-vous rencontré et comment a-t-il travaillé son rôle ?
KI : Nous l’avons
croisé un après-midi par hasard après un concert qui grouillait d’enfants. Il courait partout, nous l’avons remarqué tout de suite. Nous sommes allés parler
à sa mère et très vite, on a su que c’était lui.
DM : Mais c’est vrai qu’au départ, même si nous avions envie de le filmer, nous ne savions pas comment nous y prendre, car les premiers jours il était vraiment incontrôlable. C’est là où nous avons décidé de nous adapter à sa vie et notamment de faire
jouer toute sa famille dans le film.
DansTakara, tout est inspiré par la vie
quotidienne, tout semble si naturel et pourtant il y a quelque chose en plus, une poésie qui émane de ce récit. Les sons ont une grande importance pour vous ?
KI : La première fois où je suis allé à Aomori, j’ai senti que ce lieu avait quelque chose de sacré. Nous avions cela à l’esprit quand nous filmions les paysages enneigés…
DM : Etant donné qu’il n’y a pas de dialogues dans le film, nous avons mis l’accent sur l’environnement sonore, l’impression d’espace, les pas dans la neige, l’atmosphère
si particulière d’Aomori.
Et puis il y a beaucoup d’humour, une grande mélancolie. C’était présent dès
l’étape du scénario ?
DM : Il faut savoir que Takara est très créatif mais têtu. Il n’hésitait pas à faire ses propres propositions, souvent décalées et drôles. Quant à la mélancolie… Nous
le filmons quand il est vraiment triste, quand il dort vraiment, c’est un portrait sans filtre.
KI : Takara nous a tout de suite fait penser à un petit Chaplin japonais
JOURNAL DE TOURNAGE
1 -TAKARA DEVANT LA TV
Comme nous avons tourné le film dans l’ordre chronologique, c’est l’une
des premières séquences que nous avons faites avec Takara. C’est le
milieu de la nuit et il regarde la télévision en silence, happé par un
dessin animé. Son visage est très enfantin et en même temps, on sent la
fatigue de l’insomnie, la solitude qui est la sienne alors que tout le
monde
dort. Ce qui nous a surpris, c’est sa capacité à oublier la caméra.
Là, il y a toute notre équipe de tournage autour mais Takara est
ailleurs. A cet instant, nous avons compris que pour obtenir des
sentiments authentiques, il fallait qu’il joue des choses qui lui
plaisent ou qui correspondent aux états qu’il traversait. Quand il était
joyeux, on pouvait faire une scène joyeuse, s’il était triste ou
mélancolique, nous devions aller dans son sens. Le plan où il déterre
une mandarine cachée dans la neige, enjambe la barrièrede l’école et
dévore le fruit est sa scène préférée, nous a-t-il confié.
2- LE DESSIN
Takara dessine beaucoup, tout le temps et aime offrir ses croquis.
C’était donc logique pour nous de construire notre récit autour de celui
qu’il veut donner à son père. Notre première idée était de lui demander
de croquer son père. Un soir, après la journée de tournage, nous le lui
avons proposé mais il a refusé. Sans doute par pudeur ou bien cela lui
semblait trop évident… Quoiqu’il en soit, le lendemain, il est arrivé
avec le dessin des poissons multicolores, la pieuvre et la tortue. Nous
nous sommes tout de suite dit que c’était une bien meilleure idée, bien
plus spontanée et nous avons donc construit tout le film autour de ce
dessin. Ce qui est drôle, c’est qu’après la projection à Venise où
Takara et sa famille étaient présents, Takara a dit à sa mère qu’à ses
yeux, le film n’était pas encore terminé car il manquait la scène où il
donnait son dessin à son père.
3 – LES 2 CHIENS
Il s’appellent Sakura et Socks. Nous étions en plein tournage d’une
autre scène, dans la rue adjacente. Keiki, la grande soeur et Takara
marchaient sur le cheminde l’école. Le plan n’était pas satisfaisant et
nous avions décidé de changer la place de la caméra et toute
l’installation technique. Pendant notre préparation, Takara était parti
jouer dans la neige, comme à son habitude. Tout à coup, nous avons
entendu des aboiements répétés et très forts. Lorsque nous sommes allés
voir ce qu’il se passait, Takara était là, face aux deux chiens,
enpleine bataille d’aboiements. Le soir, en rentrant après la journéede
travail, nous avons repris le scénario et décidé d’inclure cettes cène
comique dans le film.
4 – LA TEMPÊTE DE NEIGE
C’était la scène séquence la plus difficile de tout le tournage. Sur le
papier, nous savions qu’il nous faudrait filmer Takara pris dans une
tempête sur le parking du marché où travaille son père. Un matin, elle
s’est déclenchée et alors que nous n’avions pas du tout prévu de la
tourner ce jour-là, nous avons changé rapidement le plan de travail,
nous avons rangé tout le matériel dans le camion et nous sommes partis.
Il neigeait très fort, c’était idéal. Nous avons installé la caméra et
répété l’action avec Takara. Un quart d’heure plus tard, juste avant de
commencer à tourner, Takara fondait en larmes. Il venait d’apercevoir
son père qui terminait sa nuit de travail et s’en allait. Une fois la
voiture éloignée, impossible de faire quoique ce soit. La réalité
rejoignait la fiction, le fils était confronté à l’absence de son père.
Nous avons malgré tout réussi à le rassurer et à tourner la prise qui
est dans le film, où l’on ressent toute l’épaisseur de son chagrin.
5 – LA PHOTO DU PÈRE
C’est une photographie du père de Takara, prise au marché où il
travaille. En fait, c’est la toute première que Takara a prise avec
l’appareil que ses parents lui ont offert à Noël. Elle est datée du 25
décembre. Lorsque nous avons demandé à Takara de nous révéler le contenu
de son appareil, nous avons été très émus par ce portrait d’un père
joyeux et fier, et nous avons décidé de l’inclure dans le film. Ensuite,
nous avons déroulé les autres photos (les figurines de dinosaures la
nuit, des paysages, des rues, les poissons…) et nous avons inclus
l’idée dans le scénario que grâce à ces photos contenues dans son petit
appareil, Takara retrouve la route du marché. Dans notre façon de
construire la fiction, ce genre de matière documentaire est cruciale,
c’est d’ailleurs pour cette raison que nous avions d’emblée décidé de
filmer une vraie famille. Evidemment, nous aurions pu refaire des photos
nous-mêmes mais nous aurions eu le sentiment de tricher. Takara a son
propre regard d’enfant et un style bien à lui, on le sent dans ce qu’il
saisit à travers ses dessins.
6 – LE SOLEIL SE LÈVE SUR LES COLLINES
C’est le dernier plan du tournage. Nous nous sommes rendus dans les
collines en pleine nuit et nous avons attendu que le soleil se lève.
L’hiver dans la région d’Aomori est très capricieux, il peut faire très
beau et vingt minutes plus tard une tempête de neige peut éclater. Par
chance, le ciel était dégagé cette nuit-là. Nous étions tous très
fatigués mais heureux, c’était un moment fort pour toute l’équipe.