Film soutenu

Heroico

David Zonana

Distribution : Paname Distribution

Date de sortie : 22/05/2024

Mexique – 2023 – 1h28

Luis, un jeune homme de 18 ans aux racines indigènes, entre au Collège militaire dans l’espoir de s’assurer un meilleur avenir. Là, il se heurte à un système rigide et violent, conçu pour faire de lui un parfait soldat.

Sundance 2023 – Sélection officielle
Berlinale – Panorama 2023
War on Screen 2023 – Prix du Jury Etudiant

Avec : Santiago Sandoval Carbajal, Fernando Cuautle, Monica Del Carmen, Esteban Caicedo

Scénario, réalisation David Zonana • Image Carolina Costa • Montage Oscar Figueroa Jara  • Mixage sonore Raúl Locatelli  • 1er assistant réalisateur Matías Estévez • 2nd assistant réalisateur Agustín Peralta Lemes • 2nde assistante réalisatrice Sara Ramos  • 3e assistant réalisateur Ignacio López • Casting Eduardo Giralt • Décors Ivonne Fuentes • Superviseur des effets visuels Raúl Luna  • Société de production Teodora • Production Michel Franco, David Zonana, Eréndira Núñez Larios

David Zonana

David Zonana est né à Mexico en 1989. Il a travaillé en tant que producteur avec Teorema (anciennement Lucia Films) sur des films comme 600 MILES (Meilleur Premier Film à la Berlinale en 2015), CHRONIC (Prix du Scénario à Cannes en 2015) et APRIL’S DAUGHTERS (Prix du jury à Un Certain Regard à Cannes en 2017).

MANO DE OBRA (2019), son premier long métrage, a été présenté en première mondiale au Festival international du film de Toronto. Il a été présenté en première européenne dans la sélection officielle du Festival du film de San Sebastian. Il est devenu le film mexicain le plus primé à l’international en 2019. Il a également remporté les prix Ariel (prix de l’Académie mexicaine) du meilleur premier long métrage et du meilleur acteur.

Son deuxième long métrage, HEROICO, a été présenté à Sundance Film Festival 2023 en compétition et à la Berlinale en 2023 dans la section Panorama.


Note d’intention du réalisateur

Indépendamment des vertus que nous connaissons et apprécions tous dans le Mexique contemporain, nous pouvons affirmer qu’il existe dans notre pays une maladie grave et chronique : la violence. Les raisons en sont multiples et remontent même à la période de la conquête, où se sont formés bon nombre des archétypes raciaux, sociaux et économiques qui nous hantent encore aujourd’hui.

HEROICO est un film qui explore la relation étroite entre l’identité mexicaine et la normalisation de la violence, ainsi que les catalyseurs sociaux et économiques qui réunissent les ingrédients nécessaires à son maintien. Tout cela à travers le symbolisme et les réalités actuelles forgées au fil des siècles.

Luis, comme beaucoup de jeunes Mexicains en manque d’opportunités, cherche une sécurité économique et sociale en s’inscrivant au Collège militaire héroïque, s’immergeant aveuglément dans un monde hermétique et violent et se laissant progressivement modeler par les expériences vécues sur le campus. Nous assistons à la transformation d’un jeune homme innocent à la recherche de son identité indigène mexicaine, en un cadet sculpté sur la base d’un système de valeurs militaires rigides, acquérant finalement la capacité psychologique de tuer.

Le scénario était basé sur des histoires réelles d’anciens cadets qui m’ont fait confiance et m’ont partagé leurs expériences – ce qui m’a profondément touché et m’a donné envie d’en savoir plus sur ce monde, en particulier sur les origines et le parcours des jeunes qui y entrent, ainsi que sur leurs motivations et leurs objectifs.

Pour moi, il est important de présenter cette histoire de leur point de vue, en considérant les cadets comme des personnes ayant des familles, des ambitions, des craintes et le besoin d’assurer leur bien-être (et parfois celui de leur famille) dans un Mexique de plus en plus complexe, où, en fin de compte, l’option la plus évidente pour échapper à une situation de marginalité et/ou de pauvreté est de passer par des structures de violence, qu’elles soient institutionnelles (comme c’est le cas de l’armée) ou illégales (trafic de drogue). En ce sens, l’histoire de Luis reflète celle de milliers de jeunes Mexicains qui choisissent l’alternative militaire : il est essentiel d’aborder le sujet de manière objective en termes économiques, culturels, politiques et sociaux.

Le monde militaire fait partie intégrante de notre Mexique contemporain et il ne fait aucun doute que les valeurs institutionnelles finissent par imprégner et définir les sociétés modernes. HEROICO soulève des questions sociales et économiques cruciales, et je considère qu’il est essentiel de les mettre sur la table avec l’intention d’exposer des problèmes que nous ne pouvons pas continuer à ignorer. Dans un monde où la violence augmente de plus en plus, avons-nous la capacité de garder notre moralité intacte ou allons-nous plier pour devenir notre propre pire ennemi ?

David Zonana


Entretien avec David Zonana

Qu’est-ce qui vous a poussé à raconter cette histoire ? Dans quelle mesure est-elle personnelle ?

Je voulais comprendre, explorer et dépeindre les racines complexes de la violence dans mon pays : le rôle de ses institutions, de ses structures sociales, de la pauvreté, du colonialisme, de l’identité indigène, du manque d’opportunités et de la marginalisation. Tout cela joue un rôle et je crois qu’HEROICO saisit ces idées. Ces questions sont celles de toute personne vivant dans le Mexique moderne.

Quels sont les éléments de votre film qui, selon vous, témoignent d’une pertinence nationaliste pour la société mexicaine ?

Je pense que le nationalisme est une construction moderne qui s’est développée à mesure que l’homogénéisation du monde occidental imprégnait la conscience collective. Je ne crois pas qu’un pays puisse être réduit à une seule nation. Ceux qui cherchent à englober tout le monde sous un seul drapeau manquent souvent de capacité pour reconnaître une perspective plus vaste, où l’histoire a favorisé certaines nations au détriment d’autres, même au sein d’un même territoire. HEROICO aborde ce système complexe à travers l’histoire de Luis, un jeune indigène prêt à se battre et à potentiellement sacrifier sa vie pour une nation qui ne reconnaît même pas son propre peuple. Sans parler du fait qu’il devra combattre les cartels, eux-mêmes composés de personnes d’origine indigène. Tout cela est très complexe.

Qu’essayez-vous de dire sur la masculinité toxique et le cycle de la violence qui imprègne l’armée et au-delà ?

L’armée mexicaine tente d’éradiquer la violence par la violence. Cette institution encourage la déshumanisation et la brutalité. Nous devons alors nous interroger sur la manière dont ces valeurs imprègnent la société civile.

Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez trouvé vos acteurs et comment vous avez travaillé avec eux ?

Le personnage principal ainsi que la plupart des acteurs sont d’anciens cadets ayant été enrôlés dans l’armée à un moment donné de leur vie. À mon sens, cela confère au film une authenticité nécessaire. Je voulais prendre le moins de libertés possible. Je ressentais une responsabilité particulière en choisissant de parler d’un monde aussi secret, sur lequel très peu d’informations sont disponibles.

Pouvez-vous nous parler des thèmes des brimades et de la corruption dans votre film ? S’agit-il d’un thème spécifique au Mexique ou d’une déclaration générale sur la société ?

Les brimades sont un sujet crucial, mais elles ne sont que le symptôme d’un problème plus profond. À mon sens, l’étude devrait se pencher sur les racines, le système qui l’encourage et sur les raisons qui le motivent. Quant à la corruption, elle règne sur presque toutes les sociétés humaines. Elle révèle un aspect de notre nature animale : la priorisation de notre propre bénéfice, quel qu’en soit le coût.

Pouvez-vous nous parler de vos mentors et de vos influences, notamment de Michel Franco ?

Michel a été mon premier contact avec le monde du cinéma. Je suis très reconnaissant pour son aide et le partage de ses connaissances. J’ai trouvé de nombreuses sources d’inspiration à travers diverses formes artistiques.

Lors de sa sortie au Mexique, le distributeur a fait la promotion du film avec le slogan : « le film qui dérange le gouvernement mexicain ». Pouvez-vous nous en dire plus sur cette sortie ? comment le film a-t-il été accueilli au Mexique ?

Le film a suscité une vive controverse en raison de son sujet. Beaucoup de personnes y ont vu une attaque virulente contre l’institution la plus puissante du pays, une institution qui, pour beaucoup, tire les ficelles du gouvernement, et une institution qui n’avait jamais été dénoncée de la sorte. Le film a bénéficié d’une sortie en salle importante, le distributeur ayant compris que le grand public réclamait un film qui promettait de faire la lumière sur un sujet resté dans l’ombre pendant des décennies. En conséquence, près de 500 000 personnes sont allées le voir au cinéma (ce qui est énorme), puis il est devenu le titre numéro 1 sur Amazone Prime pendant de nombreuses semaines.