Fils d’un médecin, Jean-Luc Godard est issu de la moyenne bourgeoisie protestante. Après une scolarité à Nyon, en Suisse, puis au lycée Buffon à Paris, il s’inscrit à la Sorbonne pour y étudier l’ethnologie. Il fréquente alors la Cinémathèque de l’avenue de Messine et le ciné-club du Quartier Latin. En 1952, il fait la rencontre d’André Bazin, de François Truffaut, de Jacques Rivette et d’Eric Rohmer. Il débute dans la critique en collaborant à La Gazette du Cinéma sous le pseudonyme d’Hans Lucas, puis s’affirme, avec Eric Rohmer et François Truffaut, comme l’un des fleurons des Cahiers du Cinéma. Entre 1954 et 1958, il réalise des courts-métrages. Tous les garçons s’appellent Patrick le révèle au public.
Dès A bout de souffle (1959), son premier long métrage, Jean-Luc Godard s’impose par un trait novateur, en rupture totale avec les formes du cinéma traditionnel : Jean-Paul Belmondo y vole une voiture, tue un motard, tombe amoureux et meurt. Le but de Godard n’est pas de raconter une histoire, mais d’en proposer la lecture critique du genre, en l’occurrence le thriller américain. Ce film devient l’oeuvre phare du cinéma de la Nouvelle Vague, dont Godard devient l’un des représentants emblématiques.
Le Petit Soldat, réalisé l’année suivante, est interdit pendant trois ans par la censure en raison de son actualité brûlante : il pose les doutes d’un déserteur passé à l’OAS durant la guerre d’Algérie. Anna Karina, qui y interprète le rôle principal, apparaît de nouveau dans Vivre sa vie (1962). La prostitution, thème de ce film traité à partir de vrais témoignages, reflète le sentiment d’aliénation qu’éprouve le réalisateur au coeur du monde.
Le Mépris (1963), avec Brigitte Bardot et Michel Piccoli, d’après le roman de Moravia, dénonce les dégâts d’une prostitution subtile, érigée en phénomène social à part entière.
Godard continue son exploration des rapports humains régis par le monde moderne. Histoire d’un homme en quête de l’amour fou, Pierrot le Fou (1965) met en scène Jean-Paul Belmondo, nouveau héros romantique prisonnier d’une intrigue policière tragique. Ce film marque la fin de la période encore romanesque et poétique de Godard. Le réalisateur va désormais rétrécir les trames narratives au profit d’expériences formelles et de nouvelles thématiques.
Dans La Chinoise (1967) Godard décrit comment un groupe d’étudiants fonde une cellule marxiste pendant leurs vacances, sorte de préfiguration des événements de mai 68.
Le réalisateur s’intéresse de plus en plus au côté politique que peut revêtir le cinéma. D’où Le Gai Savoir (1967) qui soumet toute création authentique au dénigrement systématique de l’esthétique bourgeoise. Fondu dans le groupe Dziga Vetov, qui prône de nouvelles formes esthétiques au service du message politique, le réalisateur s’oriente vers le militantisme : Vent d’Est et Pravda (1969), ou encore Vladimir et Rosa (1970).
Tout va bien (1972) signe le retour du réalisateur au cinéma traditionnel. Puis Godard se tourne vers la vidéo pour contrôler la chaîne de création-production. En 1980, Sauve qui peut brille à la fois par sa distribution et par un scénario rendu aux accords d’une profondeur convaincante. Passion (1982), Prénom Carmen (1983) et Détective (1985) reprennent les thèmes chers à Godard sous une forme désormais achevée. Je vous salue Marie (id.) signe une manière inédite de voir la crise de création. Suivent Soigne ta droite (1987), succession de sketches comiques et désespérés où Godard joue son propre rôle et Nouvelle Vague (1990), une critique des modes de vie contemporains. En 1991, Godard revient sur la chute du mur de Berlin avec un documentaire : Allemagne neuf zéro. Ses films suivants (Hélas pour moi, 1993 ; JLG JLG, 1994 ; For ever Mozart, 1996) apparaissent comme un flash-back sur son propre travail.
Eloge de l’amour (1999), l’histoire de trois couples symboles de trois générations, est le prétexte pour Godard de parler de l’amour sous toutes ses formes, et surtout de l’amour des arts. Puis avec Notre musique (2003) le réalisateur revient à un but plus pédagogique où il s’interroge sur le pouvoir qu’a le cinéma de décrypter notre monde. Film socialisme (2008), déroutant triptyque, reprend tous les thèmes chers à Godard qui se penche sur une Europe meurtrie, par enchaînements de courtes scènes.