Retour sur le recours…

Actualité, Vie(s) des salles

Engagement spécifique de programmation

Le 22 octobre 2021, nous avons été auditionnés à la CNACi pour défendre les intérêts d’une salle adhérente, l’espace Marcel Carné à Saint-Michel-sur-Orge.

Cet établissement de trois écrans, ayant les trois labels, est l’une des salles les plus importantes du département de l’Essonne en Ile-de-France.

Dans la ville d’à côté, à Sainte-Geneviève des Bois, la réhabilitation d’un ancien établissement commercial, nouvellement géré par le GPCI, passant de 4 à 7 écrans, avec une programmation commerciale et Art et Essai, devient une véritable menace à la continuité du travail mené à Saint-Michel-sur-Orge, risquant aussi de faire baisser ses entrées.

Comme dans beaucoup de cas similaire, le président de l’agglomération, qui est aussi le maire de la commune de notre adhérent, défend l’ouverture de ce nouvel établissement en supposant que cela n’aura qu’un impact relatif sur l’établissement de sa propre commune, ou plutôt pensant que le projet d’ouverture du nouveau complexe cinématographique aura une forte incidence sur un quartier proche de la gare RER, dynamisera cette zone et ce à moindre coût. L’intérêt de la communauté d’agglomération étant plus important que celui de sa propre ville.

Cette situation amène la DRAC a être favorable à l’implantation de ce nouveau projet tout en préconisant un engagement spécifique de programmation.

Lors de la CDAC (Commission départementale d’Aménagement Commercial), les élus et membres experts de la commission tombent d’accord pour l’ouverture de ce complexe associé à un engagement de programmation.

Ce n’est qu’après l’aval de la CDAC que le nouvel opérateur propose un engagement qui ne tient pas compte de la réalité de la programmation de l’établissement adhérent au GNCR.

En effet, le GPCI préconise de ne pas diffuser des films de moins de 150 copies en Sortie Nationale, de se partager tous les films Art et Essai de moins de 250 copies et de céder la VO sur certains films Art et Essai à moins de 250 copies. Pour tous les autres films de plus de 250 copies, il suppose qu’il y aura deux copies. Enfin, il souligne son intérêt à accepter tous les dispositifs scolaires et à adhérer à l’association départementale de salles de cinéma, Cinéssonne afin de bénéficier des animations culturelles qu’elle propose. 

Ainsi l’engagement de programmation proposé par le GPCI définit ce qu’il ne va pas faire, notamment la diffusion de films Recherche. Cette entente de programmation sait pouvoir obtenir des copies de films à moins de 250 copies, pour, en bon seigneur, les partager avec l’autre salle. Par contre, il n’est pas question pour lui de ne pas avoir accès aux films de plus de 250 copies, ces films sur lesquels il compte développer ses affaires.

Après avoir analysé la programmation de l’établissement adhérent, et avoir compris comment l’équilibre financier de cette association se réalisait en prenant en compte un certain nombre de films porteurs Art et Essai, nous sommes revenus vers le GPCI pour lui proposer nos attendus en demandant parallèlement un recours en CNACi, seule manière pour nous de faire pression afin d’obtenir cet engagement spécifique de programmation.

La négociation se fait point à point. Comme il s’agit d’une entente de programmation nationale ayant une influence importante auprès des distributeurs, nous engageons aussi un recours en CNACi, afin de permettre à notre adhérent d’avoir toujours une garantie d’accès aux films en sortie nationale.

A quelques jours de la commission, nous réussissons à obtenir un engagement spécifique qui permet aux deux établissements d’être complémentaires dans l’offre cinématographique faite aux spectateurs tout en permettant de trouver un équilibre financier viable pour les deux structures.

Ainsi, nous préservons la vitalité d’un équipement qui diffuse de la diversité culturelle face à un équipement généraliste qui proposera prioritairement des films commerciaux et Art et Essai porteurs. 

Mais l’histoire ne s’arrête pas là, car la CNACi nous informe que notre recours peut être jugé irrecevable. En effet, la jurisprudence sur les CNAC (Commission Nationale d’Aménagement Commercial) qui décide de l’implantation de zones commerciales, prévoit que les associations à vocation nationale n’ont pas à intervenir dans des décisions d’ordre local, sinon à prouver que la situation locale peut avoir des conséquences dans d’autres cas similaires un peu partout en France.

Il faut savoir que la CNACi (Commission Nationale d’Aménagement Cinématographique) est conçue sur le modèle de la Commission Nationale d’Aménagement Commercial et que la législation s’applique de même sur ces deux secteurs d’activités. 

Les membres de la CNACi viennent de changer, et le nouveau président est soucieux du respect des lois et des jurisprudences.

Nous voilà pris dans une autre négociation avec la CNACi, c’est-à-dire l’État : juger notre recours comme recevable, sinon il y a un risque qu’aucune association ou organisme à vocation nationale ne puisse faire de recours à l’avenir.

En faisant appel au cabinet Létang Avocats, et avec l’appui du SCARE et de l’ACOR, nous avons pu prouver notre intérêt à agir, en soulignant qu’il s’agissait d’un opérateur singulier à savoir une entente de programmation nationale ayant donc une influence qui dépasse le cadre local, et nous avons pu expliquer aux nouveaux membres de la Commission Nationale d’Aménagement Cinématographique que nous avions procédé comme nous le recommandait le précédent président. Garante de la continuité de l’administration et assurée du bien fondé de nos arguments, la CNACi a jugé donc recevable notre recours.

Il s’agit ainsi, après les auditions de cette CNACi du 22 octobre 2021, d’une double victoire : celle avant tout, d’avoir obtenu un engagement spécifique de programmation qui préserve les intérêts de diffusion d’un adhérent, et celle de permettre au GNCR, comme à d’autres associations à vocation nationale, de pouvoir continuer à exercer leurs droits au profit de l’intérêt général.