Film soutenu

La Pecora Nera

Ascanio Celestini

Distribution : Bellissima Films

Date de sortie : 20/04/2011

Italie - 2010 - 1h33

“L’asile est le lieu où se concentrent le plus grand nombre de saints. Saints sont les pauvres fous qui dorment sous des draps chinois, suaires de fabrication industrielle. Sainte est aussi la soeur qui, à coté de la petite lumière qui illumine sa table de chevet, brille comme un ex-voto. Mais le saint des saints c’est le docteur, il est Jésus Christ.”
C’est dans ces termes que Nicola nous raconte ces 35 ans “d’asile électrique”. Dans son cerveau disloqué la réalité et la fiction entrent en collision et génèrent des illuminations imprévisibles. Nicola est né dans les années 60 “les fabuleuses années 60”, et le monde qu’il voit à l’intérieur de l’institut psychiatrique n’est pas très diffèrent de la réalité que vivent les gens à l’extérieur. Un monde toujours plus vorace, où la seule chose qui semble ne pas pouvoir se consommer, est la peur.

B

Note d’intention

J’ai raconté l’histoire de Nicola lors de mille spectacles. Je capture les yeux du public avec mon visage, les paroles sortent de ma bouche comme une avalanche, le ton s’emporte et se fait doux, la scène est fable et réalité, le récit décharné… provoquant sourire, émotion, et quelque fois de la colère. L’ennui jamais enfin je l’espère. Puis un éditeur m’a demandé d’écrire un livre et la parole est devenue un signe différent.

Écrire demande un temps de réflexion, insinue une pudeur nécessaire, prétend à une structure plus solide, les personnages acquièrent une identité multiforme, les lieux deviennent des ambiances qui dénoncent un temps. La séduction de l’écriture demande des règles différentes : il n’y a pas la scène, ni le son de la voix, ni le visage, les émotions se réalisent à la lecture, la fantaisie se libère si le récit tient. Une aventure arrivée à bon port, un livre publié et réimprimé qui sert de prélude à une seconde entreprise plus excitante : tourner un film. Encore un langage différent, un défi, un mouvement nouveau, celui de la caméra, qui s’enrichit d’instruments, s’articule en diverses actions, se dénoue une image derrière l’autre.

Nicola est un jeune garçon né à la campagne dans les années 1960, sa mère est enfermée dans un asile, son père et ses deux frères sont bergers, sa grand-mère élève des poules et s’occupe de lui. À l’école il est relégué au dernier rang, il est distrait, il ne fait pas ses devoirs et la maitresse l’appelle “la brebis galeuse”. Mais il est amoureux de Marinella, la plus belle fille de la classe et lorsqu’il ne se perd pas dans ses yeux et dans ses cheveux bruns, Nicola parle de martiens et de femmes qui lèchent les hommes nus ; pour montrer au monde qu’il a du courage, il mange des araignées vivantes.

Un délit commis par ses frères rend cet enfant qui parle de martiens dangereux. Nicola devient un témoin gênant et la misérable famille le parque dans un asile, celui où sa mère est morte, celui où s’il parle il ne sera pas écouté. Invité et non patient dans un lieu qui l’affame et l’accueille. À la suite d’un autre évènement dramatique dont la responsabilité va lui être attribuée, Nicola va subir des traitements brutaux et se développer une seconde identité. Il s’invente un ami infirmier, peut-être quelqu’un qui lui tient compagnie. Ce sont deux acteurs différents qui raconteront le dédoublement du protagoniste et cela va générer des situations assez comiques. Dans le supermarché où il se rend fréquemment accompagné de la soeur qui le connaît depuis son enfance et de son inséparable alter égo, Nicola rencontre Marinella, son amour de jeunesse. Dans un climat d’amour suave, Nicola trouve le courage de déclarer son amour resté intact depuis 35 ans. La joie de la retrouver et la douleur de son refus sec permettent à Nicola de recomposer son identité, se libérant ainsi de son ami imaginaire.